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samedi 26 novembre 2011

Résidence de Joël Egloff

Un petit clic sur l'image et elle apparait pleine page

Quelques extraits de son œuvre

«Il m’arrive de plus en plus souvent d’être pris pour un autre. Que des gens qui me croisent aient l’impression de m’avoir déjà vu quelque part, sans parvenir toujours à se souvenir dans quelle circonstance, à quelle occasion, où et quand ils ont bien pu me rencontrer auparavant. Même si leurs visages ne me disent rien, pas plus que leurs noms, par politesse je me présente à mon tour, je veux bien faire des efforts de mémoire, moi aussi, et au hasard nous évoquons quelques endroits, quelques situations dans lesquelles nous aurions pu voir affaire ensemble. A u bout d’un moment, bien obligés de constater que nous ne parvenons pas à nous trouver le moindre souvenir en commun, pour conclure, nous échangeons deux ou trois haussements d’épaules, quelques sourires embarrassés, tandis que je m’excuse platement de ne pas être le personne que l’on pensait que j’étais. Puis nous nous souhaitons une bonne journée et poursuivons nos chemins respectifs.»

extrait de L’homme que l’on prenait pour un autre, roman.Ed. Buchet-Chastel, 2008


«Quand le vent vient de l’ouest, ça sent plutôt l’oeuf pourri. Quand c’est de l’est qu’il souffle, il y a comme une odeur de soufre qui nous prend à la gorge. Quand il vient du nord, ce sont des fumées noires qui nous arrivent droit dessus. Et quand c’est le vent du sud qui se lève, qu’on n’a pas souvent, heureusement, ça sent vraiment la merde, y a pas d’autre mot.
Nous, au milieu de tout ça, ça fait bien longtemps qu’on n’y fait plus attention. C’est qu’une question d’habitude finalement. On se fait à tout.
Pour le climat, non plus, on n’est pas vernis. Aussi loin que je me souvienne, il a toujours fait aussi chaud par ici, il a toujours fait aussi sombre. J’ai beau chercher dans ma mémoire, j’ai beau me creuser la cervelle, j’ai pas le souvenir d’un peu de fraîcheur. J’ai pas le souvenir d’une éclaircie, non plus, pas le souvenir d’une trouée dans cette chape grise qui nous tombe même dessus certains jours et nous laisse dans le brouillard du matin au soir et plusieurs jours d’affilée parfois, et des semaines entières si le vent ne se lève pas. »

extrait de L’étourdissement, Ed. Buchet-Chastel, 2005. Prix du Livre Inter


«On a traversé la rue pour aller arroser ça en face. Et c’est alors qu’il m’a dit, d’un ton un peu solennel, qu’on fêterait désormais tout ce qui pourrait être pire et qui ne l’était pas, et qu’en plaçant notre niveau d’exigence au ras des pâquerettes on arriverait bien à se réjouir de temps en temps. Même s’il fallait ramper, on trouverait toujours un peu de bonheur ou quelque chose d’approchant dans la poussière, on en trouverait au tamis s’il le fallait, comme des paillettes d’or dans la boue, mais on en trouverait. Je me suis demandé ce qui lui prenait et d’où lui montait cette euphorie soudaine. Je lui ai fait remarquer que partant du point de vue qu’on pourrait être morts, tout était forcément toujours formidable, et autant fêter chaque jour nouveau. « Mais c’est ce qu’on fera, il m’a répondu, tu verras. Mais sans exagérer non plus, sans quoi on risquerait de perdre le sens de la fête, à fêter tout et n’importe quoi.»

extrait de Ce que je fais là assis par terre, Ed.du Rocher, 2003


"12 h 26 mn 06 s"
Après avoir survolé la foule, plusieurs fois, de long en large, pour choisir un point de vue idéal, un insecte sans nom, même pas répertorié, s’était dit, bêtement, qu’il serait bien sur l’épaule ensoleillée de cette jolie brune sucrée. Derrière ses yeux à facettes, en attendant la Lune, comme tout le monde, il fit quelques pas sur la bretelle de dentelle qui parcourait la peau ambrée. Il s’approcha d’un grain de beauté, pour y goûter. Il y eut un grand courant d’air, un claquement, qu’il perçut tout en ne le percevant plus.»

extrait de Les ensoleillés, Ed.du Rocher, 2000

«Saint-Jean était un de ces villages où les chiens s’appelaient Rex et les chats Minou, où l’église se trouvait «Place de l’Eglise» et la mairie, «Place de la Mairie». Il n’y avait plus grand-chose, ici, plus grand monde. Rue Principale-anciennement rue Centrale- des bancs attendaient devant les maisons, qu’il fasse moins chaud, qu’il fasse moins froid, qu’on les repeigne ou qu’on les brûle, mais qu’on en finisse d’attendre. Les deux derniers commerces agonisaient lentement : le « Café du Soleil » et ses trois joueurs de cartes somnolents, et juste en face, une petite boutique à la devanture sombre, «Edmond Ganglion & fils- Pompes Funèbres».
L’entreprise avait connu des années fastes à l’époque où Saint-Jean était encore un village florissant au coeur d’un pays oublié par les fossoyeurs. Dans toute la région, lorsqu’il était question de funérailles, Ganglion et ses « inhumations sans douleur », comme il les garantissait, étaient incontournables. Débordé par la tâche, il lui était même arrivé de prier le ciel pour que Dieu en épargne certains. En ces temps bénis, chez « Ganglion & fils », le dernier des grouillots mangeait du tournedos tous les jours de la semaine et même entre les repas. C’était l’époque prospère.»

Extrait de Edmond Ganglion & fils, Ed.du Rocher, 1999

mardi 8 novembre 2011

Une semaine de résidence

Joël Egloff est notre invité à Saumur du 28 novembre au 2 décembre 2011. Il rencontrera des classes de lycée (Edgar Pisani à Montreuil-Bellay) et de collèges (Honoré de Balzac à St Lambert-des-levées, Paul Eluard à Gennes), un groupe d'adolescentes du Foyer des Tourelles à Saumur, ainsi qu'un groupe de jeunes adultes à l'ASPFA (Association Saumuroise de PréFormation pour Adultes) de Saumur.
Groupes et classes auprès desquels nous avons en amont animé des ateliers lecture qui leur a permis de découvrir son univers, de lire un ou plusieurs de ses livres et de préparer sa venue.
Une lecture-rencontre publique aura lieu également avec lui à la librairie Le livre à venir, le vendredi 2 décembre 2011, à 20h15 (entrée gratuite).

Pour faire connaissance avec lui, nous vous proposons le lien suivant http://auteurstv.blogspot.com/2007/12/joel-egloff.html